ORGANISATION RÉVOLUTIONNAIRE ANARCHISTE
Il faut savoir où on est pour savoir comment aller de l’avant
Ce texte a originellement été publié en marge de l’assemblée publique du 26 février 2023 à titre de texte de réflexion dans le processus ayant mené à la fondation de l’Organisation révolutionnaire anarchiste (ORA). Ce processus s’est étalé sur près d’un an et demi et a rassemblée plusieurs dizaines de militant-es autour de comités de réflexion et d’assemblées publiques.
Sur l’importance d’une investigation sociale et d’une analyse approfondie des conditions objectives du soi-disant “Québec” pour déterminer comment aller de l’avant avec notre organisation.
Pour savoir comment aller de l’avant, il faut d’abord bien connaître où on se situe. Telle est la thèse simple que je défends dans ce texte. Cela implique que nous devons fonder notre travail de construction et de définition des objectifs, principes, formes et structures de notre organisation en se basant sur une analyse approfondie et critique de la société du soi-disant “Québec” (ou du territoire sur lequel on va lutter). C’est en se basant sur une compréhension claire de la situation objective dans laquelle nous nous situons et dans laquelle nous voulons intervenir que nous serons capables de créer une organisation forte et efficace, adaptée aux conditions particulières de la société capitaliste et coloniale du soi-disant Québec. Dans ce court texte, je présenterai brièvement comment ce travail d’investigation sociale et d’analyse peut être fait.
La première étape est de faire un travail d’investigation sociale, qui vise à recenser directement quelles sont les expériences et opinions des classes populaires pour ensuite les synthétiser afin d’avoir une idée de la conscience générale que la population a de la situation sociale et de ses conditions. Ce travail vise à établir un contact direct avec les masses et à s’intéresser à leurs vécues en leur demandant de détailler comment ils vivent leurs travails, leurs logements, etc. Il vise à créer un lien de confiance et de solidarité avec les masses en même temps de développer une plus grande connaissance de la conscience générale des gens puis de ce qui les préoccupe le plus afin de développer des liens pour travailler ensemble. Voici comment cela est résumé dans un article du journal “Kites” intitulé “A call for communist social investigation a year after the summer of rebellion”: “By summing up the experience (of the masses), you should be able to identify some of the main concerns of the masses, the particular forms of oppression they face, and the best opportunities for organizing them in struggle.” Voici un résumé des étapes concrètes pour pour mener cette investigation sociale, basée sur le même article:
“Step 1: Unite a group of people to undertake a social investigation project. (…)
Step 2: Make a plan for what kind of social investigation makes the most sense in your area.(…)
Step 3: (can be concurrent with the other preparatory steps): Do some theoretical study to prepare your crew, but don’t feel like you need to study everything before going to talk to the masses. (…)
Step 4: Come up with a basic script to explain to the masses what you’re doing and get them talking. (Focus sur une crise, un problème, etc. en particulier, affectant tout particulièrement cette population.) (…)
Step 5: Get your materials together. (matériel d’information, outils d’enregistrement, cahiers et crayons de notes, etc.) (…)
Step 6: Organize your crew to be most effective on your social investigation trips.
Step 7: During your outings, try and get a broad survey of the different masses in the neighborhood, both demographically and politically. (…)
Step 8: Designate who will do what tasks after the social investigation is complete, and set deadlines. (…)” (lien pour l’article: https://kites-journal.org/2021/04/18/a-call-for-communist-social-investigation-a-year-after-the-summer-of-rebellion/)
La deuxième étape ou le deuxième élément de ce travail intellectuel essentiel est une analyse méthodique, approfondie et critique des conditions objectives de la société du soi-disant “Québec”. Il s’agit de faire un “état des lieux” de la situation dans ses dimensions économiques, politiques et sociales en détaillant la structure et le fonctionnement général de la société québécoise. Elle devra détailler quelle est la forme et les manifestations particulières du capitalisme et de la lutte des classes puis du colonialisme ici. Aussi, elle devra montrer au moins brièvement quelle est la position du soi-disant “Québec” dans le système capitaliste impérialiste international et en particulier le rapport du prolétariat québécois avec le reste de la classe ouvrière à l’échelle mondiale. Cette étude devra s’intéresser autant aux structures, institutions et lois qui régissent la vie sociale, politique et économique des personnes situé.e.s au soi-disant Québec qu’ aux faits empiriques concrets sur différents sujets comme le revenu, la production et la croissance économique, etc. Cette analyse devra déboucher sur un rapport qui exprimera notre compréhension des conditions objectives du soi-disant Québec qui fera office de texte de référence pour définir notre programme et notre stratégie.
Avec ses deux projets, l’investigation sociale auprès des masses et le travail d’analyse des conditions objectives de la société du soi-disant “Québec”, nous serons en mesure de faire des choix éclairés dans notre travail de construction de notre organisation. Peu importe ce qu’on pense du personnage, je crois qu’on peut tous.te.s être d’accord avec Lénine lorsqu’il affirme qu’il n’y a pas de mouvement révolutionnaire sans théorie révolutionnaire. Nous devons avoir une compréhension claire et approfondie de la situation puis de la conscience des gens avec lesquels nous voulons lutter afin d’agir de manière sérieuse et efficace pour atteindre nos buts puis d’éviter de se baser sur des préjugés ou de sombrer dans des schémas idéologiques figés qui nous éloignent de la réalité plus qu’ils nous aident à la comprendre et y intervenir.